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Les donateurs de « A Tree For You » y ont financé des arbres :

Arménie, de jeunes arbres y grandissent

Audit du projet et visites

lundi 16 octobre 2023, par André-Jean

L’association d’intérêt général A Tree For You (ATFY) avec l’aide de son comité de sélection, composé de scientifiques internationaux, propose en France comme dans de nombreux autres pays, des projets d’agroforesterie et de reforestation au financement de donateurs et mécènes. Les projets retenus doivent apporter des bénéfices selon un ou plusieurs des critères suivants : Bienfaits pour les communautés locales ; Enrichissement de la biodiversité ; Lutte contre le dérèglement climatique ; Régulation du cycle de l’eau ; Stabilisation des sols ; sans en pénaliser aucun par rapport à la situation précédente. Les projets et les partenaires de plantation qui en assurent la réalisation doivent en outre, par leurs compétences et expériences, apporter la garantie de la pérennité des promesses d’arbres annoncés au-delà des trois premières années après leur plantation.
L’ONG arménienne Shen est devenu partenaire de plantation à l’automne 2019, et son projet de reboisement en sylviculture et arbres fruitiers à Dzoraglukh dans la région d’Aragatsotn en Arménie a reçu le financement des donateurs de ATFY.
Cette dernière a diligenté un audit pour s’assurer de la conformité de la réalisation avec les engagements pris pour les donateurs. Le présent article résume les observations et les conclusions de cet audit. Il fait également partager quelques vues par les fenêtres qui se sont ouvertes aux membres de la mission. De nombreuses images de ce déplacement sont accessibles sur Google Photos.

Sommaire

Éléments de contexte

Contexte général de l’Arménie
L’Arménie s’étend sur 29 800 km2 (Fig.1). La population totale est de 3 millions d’habitants. Sa géographie se caractérise par sa situation au nord-est du haut-plateau arménien et par ses chaînes montagneuses très élevées. Près de 90 % du territoire se situe à plus de mille mètres d’altitude. Son point culminant historique est le mont Ararat et ses 5 160 mètres jusqu’en 1918 ; depuis, le mont Ararat se trouve en Turquie. Le point culminant actuel est le mont Aragats, 4 090 mètres, dans la région d’Aragatsotn. L’Arménie est située au cœur d’une zone qui connaît une grande activité sismique. Le dernier grand tremblement de terre a fait trente mille morts en 1988.

L’Arménie est un pays du Caucase sans accès à la mer. C’est l’un des pays les plus enclavés au monde, en partie pour des raisons naturelles (aucune façade maritime, relief très montagneux et vallées encaissées, donc des pentes fortes difficilement franchissables, villages isolés), mais aussi, pour des raisons de manque d’infrastructures modernes de transports (routes et voies ferrées en pleine réfection), et surtout pour des raisons politiques.
Cette ancienne république soviétique a des frontières terrestres avec la Turquie à l’ouest, la Géorgie au nord, l’Azerbaïdjan à l’est et l’Iran au sud. Bien que parfois située géographiquement en Asie, l’Arménie est considérée par certains auteurs comme faisant culturellement, historiquement et politiquement parlant partie de l’Europe, voire géographiquement, à sa lisière. Elle est membre de plus de trente-cinq organisations internationales, comme l’ONU, le Conseil de l’Europe, la Communauté des États indépendants, etc. Elle est aussi un membre observateur de la francophonie.
Avec un riche héritage culturel, elle est une des plus anciennes civilisations au monde [1]. Bien que l’Arménie soit un pays constitutionnellement séculier, la religion chrétienne y tient une place importante, puisqu’elle est la première nation à avoir adopté le christianisme comme religion officielle, en 301 [2].
Au plan économique et selon la Direction générale du Trésor, « Appartenant à la tranche supérieure des pays à revenu intermédiaire (PIB par habitant de 4 595 USD en 2021), l’Arménie a été durement touchée par la pandémie de Covid-19 et le conflit du Haut-Karabakh, qui ont interrompu la dynamique de croissance engagée à la fin des années 2010. L’économie a toutefois connu un rebond en 2021 avec une hausse de l’activité estimée à 5,7%, qui s’accentue en 2022, le pays bénéficiant indirectement de la situation géopolitique régionale. Un afflux inédit de visiteurs et de flux financiers en provenance de Russie a stimulé les services et largement contribué à une croissance attendue entre 8 et 13% en 2022 selon les sources. » [3]

Fig.2 Provinces d’Arménie

Les provinces d’Arménie sont contrastées (Fig. 2). L’ONG Shen n’intervient qu’au sein des provinces rurales. A l’occasion de cet audit, nous nous sommes déplacés dans les provinces d’Aragatsotn et de Lori.

Les provinces de l’Arménie sont des unités administratives de la République d’Arménie et sont au nombre [4]. Elles réunissent 48 communautés urbaines et 865 communautés rurales.

La région d’Aragatsotn se situe au nord-ouest d’Erevan. Elle abrite notamment le mont Aragats, véritable source d’inspiration de nombreux écrivains et peintres arméniens à travers les âges. Aragats, avec ses quatre sommets, est la plus haute montagne d’Arménie (4.090 mètres).

La province de Lori (ou Lorri) se situe à la frontière nord avec la Géorgie.

Contexte écologique et focus forestier

En raison de la variété des roches, des types de paysages et de sol, et de la douceur des climats à basse altitude, le sud Caucase est considéré comme un centre important d’endémisme. Par ailleurs, la Transcaucasie, dont l’Arménie, est une zone de passage des flores asiatiques, africaines et européennes, et de ce fait très riche en espèces. Enfin, cette partie du monde a servi de refuge durant les glaciations, et certains sous-groupes vivants (taxons) y ont été conservés alors qu’ils avaient disparu plus à l’Ouest. Pour toutes ces raisons, le WWF (World Wildlife Fund) a identifié l’Arménie comme faisant partie des 25 hotspots de biodiversité dans le monde.
Les forêts d’Arménie ont été largement exploitées et ont perdu des surfaces conséquentes au cours des siècles précédents. En effet, il est établi que 35 % du pays était couvert de forêts il y a 4000 à 6000 ans. Cette déforestation s’est accentuée au cours du XVIIIe siècle : il ne restait alors que 18 % de surface forestière au cours de ce siècle. En 1990, la surface forestière s’est encore rétrécie, atteignant 11,2 % en 1990 (Fig. 3).

Présentation de l’ONG Shen [5]

Shen - panneau de présentation sur son site à Erevan

Shen a été créée en 1988 par un groupe de professeurs et d’étudiants de l’Institut Polytechnique d’Erevan pour résoudre certains des problèmes humanitaires urgents dans les zones rurales d’Arménie. Le terme "Shen" a plusieurs significations en Arménien : i) C’est le village, l’ONG Shen est spécialisé dans des actions en faveur des zones rurales, elle n’intervient pas dans les zones urbaines ; ii) Le terme s’apparente aussi à la stature dressée, le fait d’être debout, vertical, et renvoie au bonheur, les commentaires sont inutiles.
Shen entretient de nombreux partenariats internationaux et notamment en France avec l’association CHENE France [6]. Elle bénéficie de nombreux soutiens internationaux provenant d’Allemagne, Suisse, USA et France, dont à présent celui de ATFY. Shen intervient pour le développement économique et social des communautés rurales. La protection de l’environnement est une des dimensions de son action. Les NGOs "Armenia Tree Project," "My Forest Armenia," et "Shen" viennent de créer “Forest Alliance of Armenia”. Ces trois organisations, actives en reforestation et en afforestation, s’unissent pour plaider en faveur de la protection et la restauration des écosystèmes forestiers et soutenir l’accroissement du couvert forestier en Arménie. Les écosystèmes forestiers fournissent une variété d’aménités : régulation climatique, des eaux, limitation de l’érosion, biodiversité, qualité de l’air, séquestration du carbone, etc. Alors que dans le même temps, les forêts sont soumises à d’immenses pressions liées aux actions humaines et aux changements climatiques.
Shen retient que

« la crise énergétique des premières années de l’indépendance de l’Arménie a eu un impact assez négatif sur l’environnement et en particulier sur les forêts. À cette époque, les populations rurales et urbaines brûlaient principalement du bois provenant des forêts. Mais en 2000, malgré la reprise de l’approvisionnement en gaz naturel freinant l’utilisation du bois de chauffage des forêts, la superficie totale des forêts a considérablement diminué pour atteindre actuellement 8 à 9% du territoire du pays. » (Il faut rappeler que la couverture forestière du pays dépassait les 30 % initialement.)
« Planter des arbres à grande échelle et assurer leur survie est l’une des principales directions pour résoudre le problème susmentionné. Par conséquent, “Shen” a pris la responsabilité de combler cette lacune dans la limite de ses humbles capacités. Particulièrement en 2006, “Shen” a établi une pépinière d’arbres forestiers et ornementaux… ».

A cette action de terrain, Shen ajoute un ensemble d’initiatives en faveur du développement d’une éducation environnementale dans l’enseignement primaire et secondaire.

Ce déplacement en Arménie et après nos nombreux échanges, nous avons acquis la conviction que l’ONG Shen est une structure solide, expérimentée, fiable, pour l’aide au développement des communautés rurales en Arménie. L’ambassade de France que nous avons rencontré en la personne de Marie Lorgeous, nous a conforté dans cette appréciation et dans la confiance qu’il est possible d’accorder à Shen pour de futurs partenariats.

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Dzoraglukh - Reboisement en sylviculture et arbres fruitiers [7]

Après l’indépendance Arménienne, le manque de ressources en énergie, obligea la population à (sur)consommer les ressources en bois abondante dans la région pour passer les hivers difficiles. Aujourd’hui les villageois de Dzoraglukh en ressentent les effets. Il est primordial de reconstituer la forêt disparue.
La communauté rurale de Dzoraglukh est située au Nord d’Erevan, la capitale de l’Arménie, dans la province d’Aragatsotn. La plantation de plus de vingt mille arbres sur trois ans a pour objectif de redonner vie à des zones qui étaient autrefois couvertes de chênes.

Des terrains d’une surface totale de cinq hectares ont été dédiée par la communauté pour les plantations de ce projet soutenu par ATFY. L’ONG Shen rend compte de l’avancement des travaux sur son site Internet [8]. Les parcelles complantées d’arbres forestiers et de fruitiers sont protégées par des clôtures.

Au terme de la visite de terrain, il apparaît que les objectifs du projet ont été atteints. Les rapports annuels envoyés par l’ONG Shen rendent compte correctement de l’avancement des travaux et de l’état des plantations. La façon dont s’est déroulé la visite a renforcé la confiance mutuelle entre l’ONG Shen et ATFY.

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Shenavan - Perspective d’un autre projet avec ATFY

Shenevan se situe dans la province de Lori tout au nord de l’Arménie. La communauté de Shenavan a pu se doter de :
• Jardin d’enfant/école maternelle (kinder garden), équipement essentiel pour permettre aux femmes de se libérer et de travailler et sans lequel les familles ont tendance à quitter le milieu rural pour s’installer en ville ;
• Club de dance traditionnelle arménienne ;
• Club sportif de lutte, l’une des fiertés de l’Arménie est son classement en haut des podiums de cette discipline au niveau international.
Trois bâtiments distincts ont été totalement rénovés à ces usages sous l’égide l’ONG Shen et la gestion locale de M. Mkhritar Mkhritarian, jeune chef de la communauté (ancien champion international sportif de lutte). C’est donc l’aspect social de SHEN (Réhabilitation des infrastructures dans les communautés rurales ; Développement communautaire basé sur les ressources locales) qui est démontré par la qualité des réalisations techniques contribuant fortement à la gestion sociale de la communauté (défaillance de l’état vis-à-vis des écoles maternelles entrainant un exode rural).

Le projet, qui serait proposé pour des plantations à ATFY, est d’une surface de 8 ha. Sa délimitation a fait suite à des discussions avec les éleveurs. Il est situé à proximité immédiate du village ne demandant donc pas d’accès spécifique et permettant l’évacuation rapides des productions futures.
Le terrain est à 1700 m d’altitude sur des sols d’origines volcaniques issus de dépôts de cendres plus ou moins anciennes reposants sur des tufs volcaniques ou des coulées pyroclastiques. La pente y est modérée sur les ¾ de la surface (<15%) et donc facilement mécanisable. La ressource en eau est assurée par des résurgences en amont alimentant de manière naturelle le canyon situé en bordure du site et un réservoir type « bassine » de 80 m3 déjà installée. La végétation actuelle est composée de prairie naturelle et de champs de cultures traditionnelles en ce milieu (pomme de terre, choux, blé essentiellement). Planter des arbres en agroforesterie comportant des cultures intermédiaires et des productions de fruits permettrait aux villageois de retirer des revenus du terrain dédié au projet.

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Et quelques jours de plus en Arménie et à Erevan

Avoir fait le déplacement jusqu’en Arménie justifiait de prolonger quelque peu notre séjour en touristes. Une aussi vieille civilisation justifierait bien plus longtemps. Ses racines actuelles sont probablement assez différentes des nôtres. Les commentaires qui suivent n’apportent que de petits coup de projecteurs. Ils sont donnés dans l’ordre de nos visites. Les photos que nous avons rapportées sont accessibles sur le site de Google-photo dont l’adresse est mentionnée plus haut.

La religion est une constante en Arménie. Nos deux premières visites en ont témoigné.
Le temple de Garni, qualifié de païen, ramène à l’époque près chrétienne de l’Arménie [9].
Juste un peu plus bas, le monastère de Gherart, en partie troglodytiques, illustre l’architecture médiévale arménienne. Le monastère fait partie d’un site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO [10].

Etchmiadzin, bien sûr : le saint-siège [11] de l’église arménienne [12], église parmi celles des trois conciles [13]. La salle du trésor nous a, exceptionnellement été ouverte.
Vendredi 13 octobre 2023, Garbis réunit l’ensemble des personnes de Shen et celles ayant participer à l’audit pour fêter son anniversaire et remercier chacun de son engagement.

Le Musée d’histoire de l’Arménie, présente dans une muséographie agréable et moderne l’ensemble des étapes des territoires et populations arméniennes depuis les premiers hommes jusqu’à nos jours.

samedi 14 octobre 2023
Yerevan Vernissage est un grand marché d’antiquaires et de brocanteurs. Il a été initié dans les années 1980 par un ensemble d’artistes américains qui voulaient faire connaître leurs œuvres.
Matenadaran (bibliothèque) ou Institut Machtots de recherches sur les manuscrits anciens est l’un des plus riches dépôts de manuscrits et de documents au monde. Un guide francophone, réservé à l’avance, nous a fait découvrir avec précision, une partie des aspects et histoires des pièces présentées en ce lieu.
Cascade (monument) étage ses jardins et plans d’eau sur plus de 120 m de hauteur. Il offre une large vision de la ville. Et il abrite dans ses parties couvertes un musée d’art moderne.

Dimanche 15 octobre 2023
Marché GYUMRI est le grand marché couvert d’Erevan. Il accueille notamment des producteurs et des agriculteurs. Il se situe dans le coeur de la ville, à deux pas de la place centrale Vartanants. Les étalages sont bien fournis en légumes et fruits de toutes sortes, mais aussi en produits du terroir local. Nous y avons vu, et acheté, notamment des plateaux de fruits secs variés magnifiquement présentés, comme pour un réveillon de Noël.

PAK SHUGA est un autre marché couvert. Son entrée est monumentale, mais il a maintenant été transformé en supermarché.
La Mosquée bleue d’Erevan fait face au précédent temple de la consommation. Elle est d’influence Perse.
Le Musée d’histoire de l’Arménie ferme la Place de la République au nord. Muséographie moderne et efficace, c’est évidemment un incontournable.

Lundi 16 octobre 2023
Khor Virap, au Sud d’Erevan, est dominé par le  Mont Ararat, anciennement arménien et aujourd’hui Turc.

Malheureusement, ce dernier, comme souvent paraît-il, était dans les nuages. Il faut donc consulter les photos disponibles sur Internet pour imaginer l’impression que peut donner ce géant, ancien volcan, qui culmine à 5137 m. Ce monastère est également l’un des lieux emblématiques de l’histoire arménienne qui se confond souvent avec celle de sa religion. C’est le premier lieu saint de l’Arménie chrétienne. C’est aussi la bible qui trouve ici la référence à l’échouage de l’Arche de Noé.

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Voir en ligne : Arménie — 2023-10-08-16


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[1Ne pas manquer de visiter le Musée d’histoire de l’Arménie

[5Voir les pages en français de l’ONG Shen

[6Voir le site Web de l’association CHENE France

[7Voir les caractéristiques du projet et son avancement sur le site de ATFY : Reboisement au village de Dzoraglukh, sylviculture et arbres fruitiers en Arménie. Des informations sont données sur l’avancement du projet ici

[8Voir sur le site Web de Shen l’avancement des plantations à Dzoraglukh : Plantation de 5 ha de forêt sur les terres communautaires et reconstruction du système d’irrigation

[9Voir le commentaire sur le site ici

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