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Combien de Sivens demain ?

jeudi 30 octobre 2014, par André-Jean

Le projet de barrage de Sivens a conduit à un drame ; une finalité contestée, un dimensionnement excessif, des zones humides englouties, une opposition ignorée. Au-delà de la médiatisation, la multiplication de projets, même relativement modestes, perturbe de nombreux milieux, modifient les voisinages et les usages, soulèvent les contestations. Et pourtant …

Projet de retenue du Tescou à Sivens
Infographie publiée par La Dépèche le 31 août 2014

Nombres d’éoliennes provoquent déjà des rejets Éolien : le débat reste ouvert. Le reportage mentionné compte 5 000 éoliennes aujourd’hui en France et annonce 25 000 machines demain. Il faut diminuer les émissions de gaz carbonique qui contribuent au réchauffement climatique, il faut continuer à éviter les centrales électriques à charbon ou au gaz. Par ailleurs, nous voulons réduire la part de l’électricité d’origine nucléaire. Les éoliennes produisent de l’électricité quand le vent souffle, c’est à dire environ 1/4 du temps en France. Il faudra donc stocker de l’énergie. Le moyen le moins cher, et de loin aujourd’hui, est de le faire sous forme de retenue d’eau en amont d’un barrage.

Un barrage tel que celui de Sivens, 1,5 million de mètres cube de volume d’eau, 12,8 mètre de hauteur d’eau Barrage de Sivens permettrait de stocker environ 30 000 kiloWatt.heures soit 30 MWh (mégaWatt.heure) représentant 10 heures de production d’une éolienne actuelle … quand elle produit, c’est à dire environ 20% du temps.

Alors combien faudra-t-il de barrages identiques répartis dans les territoires, au plus près des productions et consommations décentralisées d’électricité, quand l’intermittence des productions éoliennes ne sera plus compensée par la souplesse des modes actuels de production ? Combien si l’on veut en outre arrêter les modes de production émetteurs de gaz à effet de serre (centrales au charbon et au gaz) ? 10 à 100 dans chaque département ? Et ceci sans compter un effet accru avec le photovoltaïque qui, en dehors du sud de la France, a un facteur de charge moitié moindre que l’éolien.

Rassurons-nous le risque est de moindre ampleur : il n’y a pas les sites, il n’y a pas l’eau pour un tel programme et il n’y aurait pas les forces de l’ordre pour s’opposer aux opposants ! Ces chiffres sont absurdes évidemment. Ils peuvent toutefois aider à comprendre les ordres de grandeur en jeu. Les énergies prétendument vertes, pourraient bien ne plus l’être toujours, partout et pour tous. Car, même si les chiffres n’atteignent pas un tel niveau, la pression sur les milieux et les territoires devrait croître. Ce n’est pas qu’en France. Partout dans le monde (Brésil, Inde, Chine, etc.) des populations, des communautés, se dressent contre les barrages et les projets hydroélectriques.

Messages

  • Déjà quelques réactions reçues directement sur ma messagerie :

    Effectivement nous pouvons nous inquiéter de la multiplication de tels conflits dans l’avenir. Ceux-ci seront suscités par la difficulté accrue de concilier les impératifs économiques (compétitivité) avec les contraintes écologiques. Les contradictions du concept de développement durable vont être de plus en plus manifestes. Celles-ci seront attisées par la dialectique de la légitimité d’actions -souvent violentes- contestant l’état de droit. José Bové porte à cet égard une responsabilité particulière. Ceci doit nous conduire à encourager des études techniques approfondies à différentes échelles spatiales et temporelles pour aider nos concitoyens à trouver progressivement les compromis les meilleurs assurant tout à la fois le développement économique et le maintien des équilibres écologiques fondamentaux.
    Hervé


    Merci, de quoi alimenter la réflexion stratégique...
    Mathieu


    C’est une bonne mise en perspective : elle permet d’y voir un peu plus clair, au-delà de l’émotion.
    Martin


    Bon article court, clair mais pas simpliste : on comprend qu’on n’aura pas le beurre, l’argent .... etc. et qu’il faut se préparer à consommer moins plutôt qu’à s’équiper plus ....
    Marie

  • Sommes-nous condamnés à toujours dissocier production, stockage et distribution de l’énergie ? Que penses-tu de cette idée (prophétie ?) de Jeremy Rifkin sur l’avènement d’une révolution de l’énergie décentralisée, d’un Internet de l’énergie, où une multitude de micro-acteurs en seraient à la fois producteurs et consommateurs ? Espoir ? Utopie ? S’il en était ainsi, est-ce que cela ne changerait pas les données de la problématique actuelle ?

    • Après « La troisième révolution industrielle » Jeremy Rifkin fait la promotion de son dernier ouvrage « La nouvelle société du coût marginal zéro ». Je n’ai pas eu encore l’opportunité de le lire.
      Je rappelle cependant ce qu’explicite Denis Bonnelle Électricité solaire massive, Court-termisme et autarcie. Les limites aux gains de performance ne sont pas de même nature dans le domaine de l’électronique et dans celui de la production d’énergie, notamment renouvelable. Grossièrement, il faut toujours à peu près la même surface pour capter une énergie diffuse.
      Concernant l’éolien, le vent n’est favorable à la production que 20 à 25 % du temps avec de longues périodes sans souffles suffisants. Le soleil ne brille au mieux que de jour et plus l’été que l’hivers et ceci sur toute l’Europe en même temps. Lors d’un anticyclone hivernal, ces contraintes imposent d’autres sources d’énergies ou un arrêt des consommations.
      Certes l’efficacité énergétique devrait encore nous faire gagner une moindre dépendance, mais les besoins de stockage croîtront inexorablement avec la part de productions intermittentes d’énergie. Et pour ce qui concerne l’électricité, le stockage sous forme de réserves d’eau restera encore longtemps le moins coûteux.
      Combien de retenues et quels volumes stocker ? Ils dépendront de bien des facteurs. Mais les ordres de grandeur permettent d’apprécier les défis.

  • Moi, j’avais cru comprendre que Sivens c’était pour irriguer des entreprises agricoles. Je n’avais pas associé Sivens à de la production d’électricité. Est-ce que je me serai trompée ?

    • Tu es dans le vrai Cath. Sivens est prévu pour l’irrigation. J’ai simplement voulu imaginé qu’il serve à produire de l’électricité, ce qu’il pourrait faire du reste à l’occasion des lâchers d’eau pour les besoins agricoles. Et dans ce cas le potentiel énergétique qu’il représente permet d’estimer combien il en faudrait pour absorber le stockage d’électricité d’une éolienne.
      Il est certain que les choses ne se feront pas ainsi, en revanche les ordres de grandeurs mettent en évidence les défis à relever et les conséquences des choix opérés par ailleurs.

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