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Le Grand débat national

Débattre au Parlement d’une réforme des prélèvements obligatoires

A partir de la fiche sur "La fiscalité et les dépenses publiques"

mardi 29 janvier 2019, par André-Jean

Le Grand débat national s’organise en quatre thèmes. La fiscalité et les dépenses publiques y trouvent sa place. Est-ce écho aux attentes exprimées dans la rue à l’automne 2018 ? Il s’agit, dans le présent article, de s’appuyer sur des extraits de la fiche dédiée au thème "La fiscalité et les dépenses publiques", pour apporter parfois commentaires ou propositions ..., contributions sur le site du Grand Débat.

La fiche dédiée au thème "La fiscalité et les dépenses publiques" commence par la première phrase :

Le vote annuel du « budget » par les parlementaires permet à l’Etat de collecter les impôts pour financer toutes les actions publiques.

L’évolution du prix des carburants est à l’origine de la protestation des Gilets jaunes. Ceux-ci n’ont pas retenu l’augmentation du prix du pétrole, mais se sont focalisés à l’encontre des 0,12 à 0,13 €/l de carburant de la taxe carbone [1]. Son niveau et son évolution avaient été adoptés par le Parlement et plusieurs fois, après débats, lors des votes des lois de finance.

Quelques années auparavant, les Bonnets rouges avaient obtenu l’abandon de l’écotaxe poids lourds pourtant adoptée très largement par le Parlement. Elle visait à faire payer l’usage des routes par leurs utilisateurs en leur faisant supporter les coûts réels du transport routier de marchandises, comme cela se fait chez des voisins européens. Née après le Grenelle de l’environnement, elle est apparue, à tord, comme une fiscalité environnementale.

Ces mouvements populaires, parfois violents, interrogent sur la possibilité, en France, d’utiliser la fiscalité pour servir les politiques environnementales. Notre pays est en retard dans ce domaine sur nos voisins, et ceci malgré un taux de prélèvements obligatoires élevé. La Commission européenne comme l’OCDE nous invitent pourtant dans ce sens et les économistes s’accordent sur l’efficacité pour la société d’utiliser cet instrument.

Plus profondément, le Parlement étant par excellence l’organe de la souveraineté fiscale, ces échecs répétés soulèvent-ils une question de légitimité ? Ou au contraire appellent-ils à un exercice différent de ce pouvoir législatif et budgétaire ? ... à l’inverse de l’impression d’instrumentalisation qui pourrait ressortir de la première phrase de la fiche ? N’appellent-ils pas à un véritable débat parlementaire, pour ne pas évoquer un débat populaire, sur ce qui peut apparaître, par exemple aux yeux de Jacques Fournier, comme « une vision dominante [...] : la France championne du monde des dépenses publiques et des prélèvements obligatoires, un déficit public qu’il faut réduire, nous payons trop d’impôts, il faut faire des économies. » [2]. La fiche déploie des qualités explicatives indéniables, mais on perçoit clairement quelques perspectives orientées.

Le Conseil Économique Social et Environnementale, après son élargissement donné par la modification constitutionnelle de 2008 et pour dans son premier Rapport annuel sur l’état de la France, appelait à Réaliser une indispensable réforme des prélèvements obligatoires. Ses recommandations restent d’actualité. [3]

Les questions sont sensées apporter des éclairages au gouvernement.

Quelles sont toutes les choses qui pourraient être faites pour améliorer l’information des citoyens sur l’utilisation des impôts ?

Réduire les corps intermédiaires, limiter le rôle du Parlement, contribuent à faire table rase et au repli de chacun, non à élaborer une espérance commune. Le Parlement, dans notre démocratie, est, par excellence le lieu de la souveraineté populaire. Il doit se saisir de la nécessité d’une réforme des prélèvements obligatoires et en préparer le cadre [4] D’autres propositions expliquent Comment réconcilier taxe carbone et pouvoir d’achat [5].
Proposition : Débattre au Parlement du cadre pour une réforme des prélèvements obligatoires.

Quels sont selon vous les impôts qu’il faut baisser en priorité ?

Réduire les dépenses publiques et lutter contre le réchauffement climatique, indique quelques pistes, notamment

  • interrompre dès à présent les 5 à 7 Mds€/an de financements publics aux productions d’électricité intermittentes, non pilotables, non réductrices des émissions de gaz carbonique,
  • réduire ou supprimer "Les aides publiques dommageables à la biodiversité".

Les bien trop nombreuses exemptions fiscales nourrissent le doute. Elles érodent la confiance dans le respect des valeurs d’égalité et d’équité. Elles érodent la légitimité des prélèvements obligatoires. La suppression et la limitation des exonérations, niches et dépenses fiscales inutiles ou inefficaces ouvriraient en outre la porte à de possibles réductions d’impôts substantielles. « Les Niche fiscales sont de précieux gisements de fonds publics » affirme Clément Charbonnier. En supprimant des niches fiscales avérées inefficaces, l’Etat pourrait réallouer au moins 18 milliards d’euros à des services publics asphyxiés, ... ou à des réductions d’impôts. [6] Et ceci sans ouvrir les polémiques sur la réduction de la fraude ou de l’optimisation fiscale agressive. [7]
Proposition : D’abord simplifier la fiscalité et éviter la multitude des exemptions.

S’il faut selon vous revoir les conditions d’attribution de certaines aides sociales, lesquelles doivent être concernées ?

La précarité et plus largement la pauvreté frappent de trop nombreux Français. Sujet essentiel dont regrette qu’il ne figure comme tel dans le Grand Débat. Peut-on pour autant l’évoquer par le biais de précarités particulières, comme celle évoquée dans la fiche sur la Transition écologique ? Y a-t-il souvent précarité énergétique, alimentaire, sanitaire, de mobilité, fracture culturelle ou numérique, sans précarité tout court ? Efficience et évaluation, doivent accompagner le choix et à la mise en œuvre des importants efforts de solidarité pour lutter efficacement contre la précarité et la pauvreté. C’est l’inverse d’une pratique qui disperse les aides en décorations sociales de diverses politiques publiques.
Proposition : supprimer les approches sociales thématiques et conditionner les aides à une approche intégrée de la lutte contre la pauvreté et la précarité.


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Voir en ligne : Débattre au Parlement du cadre pour une réforme des prélèvements obligatoires


[1La Taxe carbone en France, ou Contribution Climat-Énergie est une composante des taxes intérieures de consommation (TIC) sur les combustibles fossiles, proportionnelle à leur contenu carbone. La Taxe carbone n’est pas une spécificité française. Elle s’appuie sur une argumentation économique bien documentée pour son efficacité au plan de l’intérêt général

[2Action Publique, le blog de Jacques Fournier Fiscalité et dépenses publiques : un débat biaisé

[3Le CESE a adopté le 14 décembre 2011 son Rapport annuel sur l’état de la France en 2011. On y trouve notamment :

  • p. 18

    Le CESE s’est prononcé à maintes reprises, et encore récemment, sur la nécessité d’une réforme profonde de l’ensemble de la fiscalité. Il n’est plus possible aujourd’hui de proposer un projet collectif pour la France sans donner l’assurance concrète que le fardeau sera porté équitablement !

  • p. 26 Et en anticipations des remarques et questions de l’article Réduire les dépenses publiques et lutter contre le réchauffement climatique

    Le CESE préconise une utilisation plus systématique et plus cohérente des signaux prix (y compris en utilisant l’instrument fiscal), comme il l’a déjà fait dans des avis antérieurs. Il renouvelle avec insistance cette recommandation. Ces signaux-prix doivent être accompagnés simultanément par des politiques publiques susceptibles d’ouvrir des alternatives à tous les acteurs. La réforme du système fiscal, appuyée sur une réflexion sur les prélèvements obligatoires, déjà évoquée plusieurs fois dans cet avis, devra prendre en compte une telle évolution (cf. infra).

  • p. 26 D’où la recommandation du CESE :

    Réaliser une indispensable réforme des prélèvements obligatoires — [...] Une réforme d’ensemble de la fiscalité a été recommandée par plusieurs avis du CESE dans le passé. Aujourd’hui, une telle réforme est indispensable comme gage préalable d’équité dans la charge du fardeau de toute ambition collective pour le pays. Elle l’est de surcroît pour améliorer la compétitivité du pays et l’orienter vers un futur souhaitable et, à ce titre, elle doit être couplée à une réflexion d’ensemble relative aux prélèvements obligatoires.

  • p. 174, sous le titre « Les hauts revenus » on lit :

    S’il existe bien des raisons objectives à ce qu’une grande majorité de Français ressente une stagnation de leur pouvoir d’achat, voire une baisse pour une partie non négligeable d’entre eux, s’ajoute dans leur perception des évolutions de revenus un sentiment de déclassement qui tient, autant qu’à leur situation propre, au fait qu’une partie des ménages échappe à la rigueur des conséquences de la crise.

    .

[4Si une telle initiative était retenue, elle ne partirait pas de rien. Des réflexions et des consultations sont déjà sur la table. France Stratégie, dans le cadre de son exercice 2017-2027, interroge en 2016 : Quels principes pour une fiscalité simplifiée ?. D’autres exercices ont également défriché le sujet.

[5Christian De Pertuis, Professeur d’économie, fondateur de la chaire « Économie du climat », Université Paris Dauphine – PS, avait beaucoup contribué, comme président du groupe de travail sur la fiscalité environnementale, à faire progressé celle-ci à travers l’évolution de la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE). Il soutient que les crises peuvent être le terreau de profondes réformes fiscales et il suggère un revenu minimum d’existence, un lissage de l’IR et un renforcement de la fiscalité sur le carbone et plus généralement de la fiscalité environnementale : Comment réconcilier taxe carbone et pouvoir d’achat

[6Le montant des dépenses fiscales s’est élevé à 89,9 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2017 précise l’article de Patrick Roger Budget 2017 : 451 niches fiscales recensées. D’où la contribution de Clément Charbonnier Grand débat national : « Les niches fiscales sont de précieux gisements de fonds publics »

[7De 60 à 80 Mds€ est le montant de fraude fiscale estimé par le Syndicat national Solidarité Finance en 2013 dans son Rapport sur les évasions et fraudes fiscales. Une limitation de tels montants permettrait de réduire bien des impôts.

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